Chapitre 13 – L’Amazone – Tome 1
Les Protecteurs (L’Amazone, Chapitre 13)
– « Bienvenue, Alexis. Cela faisait un moment que nous n’avions eu la chance de nous revoir », dit le grand blond devant sa troupe de guerriers. Le regard était chargé d’émotions et en disait plus long sur le fond de ses pensées pour celle qui les avait partagées.
– « Merci, Jeff. Cela m’a paru également très long », lui répondit l’Alpha.
Puis, en se tournant vers la petite assemblée qui lui avait réservé cet accueil, elle reprit.
– « Cela nous fait toujours plaisir de voir un clan allié prospérer de la sorte, surtout quand ce dernier est aussi étroitement attaché à notre lignée. Votre accueil nous honore et espérons vous rendre prochainement la pareille lors de vos visites à venir. »
Elena, qui n’en était pas à ses premiers échanges avec le clan du Nord, ne se sentait toutefois pas à l’aise avec l’objet de cette visite improvisée. Seule Kayla, à ses côtés, ne ressentait aucune tension. Elle était occupée à détailler ce camp, si différent du sien et pourtant si semblable étant donné le destin qui leur était réservé et leur raison de vivre. Un clan d’hommes. Ça lui faisait bizarre. Elle n’avait pu s’empêcher de constater le manque de présence féminine, contrairement à son clan qui acceptait la présence masculine. Peut-être était-ce dû à un tempérament plus instable des hommes guerriers. Elle se ressaisit : ce clan était pacifique. En y réfléchissant plus, elle fit le lien avec leur genèse et s’en voulut d’avoir sauté sur des conclusions si hâtives. Elle continuait d’observer autour d’elle. Aujourd’hui était la première fois qu’elle rencontrait l’alpha, ou plutôt le leader de ce clan. Elle était d’autant plus troublée que des bruits avaient couru, pendant un moment, sur une éventuelle relation entre Alexis et ce dernier. Il avait l’air prévenant et triste à la fois. Était-ce le fait de revoir Alexis ? Ou l’objet de leur rencontre du moment ? Elle se promit de garder un œil pour se faire sa propre opinion. Elle n’était pas du genre ragot, mais aimait savoir à quoi s’en tenir quant aux motivations des personnes qu’elle rencontrait. La plupart des alphas finissaient par avoir ce regard au bout de quelques années, à force de voir périr sous leurs yeux leurs troupes. Elle concevait que cela devait être une véritable torture mentale. Enfin pour les clans civilisés, bien entendu…
Elle se focalisait de nouveau sur Alexis. Elle avait promis à Elise de la surveiller de près pendant ce voyage. Elle ne voulait pas faillir à sa promesse, bien qu’Alexis ne risquait rien ici. La petite lui faisait confiance et après l’épisode de ces dernières semaines, elle tenait à regagner sa pleine confiance. La grenouille ! Quelle sale gamine entêtée ! De mémoire d’homme, on ne se souvenait pas d’une guerrière qui avait forcé sa nature pour faire évoluer sa lueur. Encore moins pour un simple motif de protection des autres. Ce fut une véritable déception pour elle de ne pas pouvoir accompagner son alpha pour ce voyage. Kayla comprenait le déchirement que cela pouvait engendrer pour une voltigeuse. Elle comprenait ce lien sans vraiment en ressentir la force ou la profondeur. Elle l’avait déjà lu dans le regard de Gwen et Elena précédemment quand il leur arrivait de ne pouvoir être l’ombre d’Alexis pour une quelconque raison. Un vrai mystère que ces euménides ! Bienveillantes et dévouées, mais de vraies furies au combat quand on s’approche de leur alpha. Enfin, des furies pygmées, vu leur taille à côté des amazones porteuses. Kenza, plus réservée, avait tout fait pour dissimuler sa peine. Bien sûr, par la nature de cette rencontre avec le clan du Nord, Alexis aurait pu venir accompagnée également de Kenza. Cette rencontre devait en effet sceller en partie le destin à moyen terme d’Elise. Mais comment justifier auprès d’Elise que Kenza puisse l’accompagner et pas elle, alors que cette dernière n’avait pas encore réussi à basculer, même à moitié, sur son âme de guerrière. Non pas qu’on leur demandait de le faire mais cela n’aurait pas été logique pour Elise. Alexis et Elena avaient préféré éluder la question en expliquant qu’elles ne voulaient pas alarmer le clan avec leurs lueurs bâtardes. Fin de la discussion, car cet argument tenait la route.
Elle était encore en train de se remémorer tous ces évènements quand, instinctivement, elle se mit à chercher son compagnon de mission parmi le petit attroupement qui servait de comité d’accueil. En vain. Seuls une cinquantaine d’hommes étaient présents. Les autres étaient en mission ou vaquaient à leurs entraînements.
– « Je vous propose, Walkyries, de vous sustenter dans un premier temps dans notre salle de Conseil. Nous serons fiers par la suite de vous montrer les derniers aménagements entrepris au sein de la cité. Un dîner est prévu ce soir en votre honneur. J’ose espérer que vous nous ferez le plaisir d’y assister. Tout le clan est convié », finit Jeff dans un sourire franc.
– « Avec grand plaisir. Encore merci pour votre bienveillance et votre accueil », s’inclinait Alexis avec politesse, imitée par ses deux acolytes.
Au moment de suivre l’Alpha et ses conseillères, la foule de curieux se dissipa calmement, mais non sans bavardages. Seul le chef de clan et ses proches conseillers assisteraient à cette entrevue.
L’exploit du rat de laboratoire (L’Amazone, Chapitre 13)
Leur salle de Conseil était sobre sans être trop masculine, pensait Kayla. Pas d’armures ou de têtes d’animaux en guise de trophée, comme elle avait pu se l’imaginer. Le temps d’observer ce nouvel environnement, l’ambiance se détendit d’un coup.
– « Mesdames, je vous présente mes bras droits, Luis et Sven, mais je pense que la plupart d’entre vous les aviez déjà rencontrés. Je reconnais Elena, mais je ne pense pas avoir le plaisir de connaître votre deuxième sœur », interrogea poliment Jeff.
– « Il s’agit de Kayla, une de mes plus brillantes porteuses, qui nous a rejointes il y a quelques années maintenant. Sa venue était importante pour moi car en dehors de ses compétences sur le terrain, elle a le mérite d’être partie à la recherche d’Elise, de l’avoir formée et d’être aujourd’hui une de ses plus proches amies », exposa Alexis avec un sourire de fierté. Ses qualificatifs plus qu’élogieux intimidèrent Kayla qui ne s’attendait pas à une telle reconnaissance devant des étrangers.
– « Ah ces lueurs bâtardes… un vrai casse-tête. Si je puis me permettre, Kayla, je serai vraiment intéressé de savoir ce que tu as pu apprendre jusqu’ici en évoluant près de ces deux mutantes et en les étudiant ».
Kayla fronça les sourcils. Même si le sourire de Jeff était franc et sans aucune malveillance, ce terme était définitivement à éviter pour parler de ses sœurs. Remarquant tout de suite le malaise qui en découlait des termes employés, Jeff s’empressa de corriger.
– « Pardon, je ne voulais pas te froisser. Ce n’est pas un manque de respect à leur égard. Nous n’avons juste pas trouvé d’autres termes plus appropriés pour dénommer ces cas isolés. Comme tu le sais, nous avons ce phénomène au sein de notre fratrie. Mais notre frère était l’un des nôtres avant que sa flamme n’évolue, alors que vos sœurs se sont éveillées avec cela en elles. Aaron est toujours l’un des nôtres, bien sûr, mais nous cherchons juste à comprendre ce qu’il s’est passé et ce qu’il l’attend. »
Luis, si cela était bien son prénom, prit la relève.
– « Ce que veut dire Jeff est que nous sommes aussi perdus que vous, peut-être plus encore. Il ne s’agit pas d’un phénomène lié aux amazones car Aaron n’appartient pas à votre race de guerrières. Il est un protecteur. Il est donc possible de ne pas s’éveiller avec cette lueur blanche, comme vous auriez pu être tentés de le croire par votre expérience. Il serait intéressant de confronter nos observations pour faire avancer nos études, comme le souhaitait Gwen. »
– « C’est en effet un sujet à étudier et votre aide sera la bienvenue », remercia Alexis. « Deux autres lueurs blanches se sont éveillées dans le monde ces dernières semaines mais elles nous ont malheureusement échappé. Nous n’avons même pas pu les identifier. Aucun clan connu n’a mis la main dessus. A la lumière des évènements qui concernent Aaron, nous ne pouvons même plus affirmer qu’il s’agisse de guerrières, ou tout simplement de femme. Depuis, il semblerait que le rythme des révélations se soit calmé. » Un regard de connivence s’échangea entre Luis et Sven. Mais avant d’éveiller la méfiance des visiteuses, ils décidèrent de jouer carte blanche. Ils souhaitaient vraiment coopérer. Il n’y avait aucune compétition entre ces deux clans et ce, depuis la nuit des temps. Les âmes guerrières mâles et femelles ne s’entrechoquaient pas ici.
Jeff se déplaça près du bar pour servir des rafraîchissements, tandis que d’un signe de tête, Sven invita tout le monde à s’asseoir autour de la grande table du conseil. Le temps de se débarrasser de leurs manteaux et équipements, Sven commença à expliquer.
– « Lors de ma dernière mission, j’eus la charge d’aller quérir une de ces deux lueurs pour la mettre à l’abri, car nous avions reçu également ce signalement. Ce que nous ne recevons pas lorsqu’il s’agit d’une appelée amazone. Nous attendons en général votre appel pour vous prêter main fort. Bref, pour la quête de cette lueur, nous avions croisé Callie, qui la cherchait également. Nous n’avons malheureusement pas eu le temps de la saluer car comme vous le savez, tout s’est passé très rapidement et dans la confusion la plus complète. Mais j’ai eu l’occasion d’approcher cette lueur. Elle était une des nôtres, un guerrier. Du moins, c’est ce que j’ai cru en l’apercevant. Mais à son contact, je n’ai rien ressenti. Je voyais sa lueur blanche mais rien au sujet de son âme de guerrier. »
Kayla, captivée par ce détail, ne perdait pas une miette de cette conversation. Sven continuait son explication devant le regard intrigué des visiteuses.
– « En touchant cette lueur que j’ai pris pour un de mes frères « bâtards », j’ai eu la confirmation qu’il n’y avait ni âme de guerrier, ni de force bestiale… »
Kayla réfléchissait tout haut.
– « Donc cette lueur s’applique aussi à des civiles lambda… »
– « Nous en sommes là de nos observations », reprit Jeff en tendant les verres à chacun.
– « Mais cela n’explique toujours pas pourquoi les deux autres ont disparu de notre radar, alors que nous voyons encore les vôtres et celle d’Aaron », dit Luis avant de prendre une gorgée.
– « Vous pensez qu’ils ont été tués ? », s’inquiéta Alexis.
– « Ou quelque chose de plus puissant les protège en les dissimulant », conclut Luis.
– « Il y a beaucoup d’inconnues dans cette équation », résuma Elena. « Un phénomène qui touche des walkyries, des protecteurs et des civiles ; hommes ou femmes ; révélation innée ou évolutive … On ne connaît ni la nature ni la finalité de leur existence. Et pour finir, quelqu’un ou quelque chose les tue ou les protège… »
– « Tu as l’air particulièrement pensive, Kayla. »
– « Je réfléchissais, Sven. Nous pensions protéger nos sœurs des autres clans, motivés par des raisons cupides. Si cela se trouve, nous nous trompons d’ennemi… Si une force supérieure arrive à dissimuler ces entités, alors la menace est peut-être plus grande qu’on ne le pense. Nous avons peut-être commis une erreur en allant les quérir. Elles ne sont peut-être pas en sécurité avec nous, Alexis ». Kayla avait dépassé le stade de l’inquiétude. C’était bien la panique qui tapissait son regard.
– « Si nous ne l’avions pas fait, Kenza et Elise, auraient été attrapées par d’autres clans ».
Elena tentait de la calmer. Alexis restait silencieuse face à cette éventualité. Tout le clan s’était inquiété de savoir si les voltigeuses seraient aptes à reprendre le flambeau malgré leur lueur et la protéger. Mais les rôles étaient inversés. Elle avait peut-être fait courir un danger à ses filles en ayant accueilli Kenza et Elise. Ces mêmes filles qui avaient placé leur confiance en elle depuis le jour de son intronisation.
– « Est-ce que d’autres clans ou organisations ont tenté d’approcher Aaron ? », s’enquit Kayla.
– « Depuis sa mutation, il ne part plus en mission. Les enceintes du clan le protègent et notre présence doit sûrement les refreiner. Aucune nouvelle compétence ne s’est manifestée chez lui depuis, hormis celles qu’il avait déjà. Et pour être sincère, nous doutons qu’il soit en mesure ou en état de les maîtriser si elles venaient à apparaître … ». Le ton de Jeff faisait écho à son regard désormais voilé. « Nous ne savons pas s’il s’agit d’une conséquence de sa mutation ou du fait d’être privé de son cristal, mais il dépérit et cela commence sincèrement à nous inquiéter. »
– « Je sais. Tu ne nous aurais pas appelées si sa vie n’était pas en danger », coupa Alexis, compatissante, qui n’essayait plus de cacher leur proximité. « D’ailleurs, Aaron n’est pas le genre de personne à se plaindre. »
– « C’est vrai », intervint Luis, touché par cette image de leur frère qu’avaient ces walkyries. « Il ne se plaint jamais. Il se contente des récits de Kayla et des photos qu’elle lui envoie. Il fait passer le bien-être d’Elise et de votre clan avant tout. Il connait son devoir. Mais il faiblit et nous craignons aujourd’hui pour sa vie. »
– « Je ne vous remercie pas assez pour comprendre la situation dans laquelle nous sommes. Vous savez que notre clan est en pleine mutation. Nous pensions tout d’abord qu’Elise et Kenza allaient remplacer Elena et Gwen, d’où notre besoin de temps. Mais au vu des dernières révélations, il nous faut revoir notre conception de leurs rôles. »
Jeff, Sven et Luis apprenaient par ces mots la mort prochaine d’Elena et Gwen, et ne pouvaient s’empêcher de lui tendre un regard attristé et plein de sollicitude. Elena leur sourit poliment en retour, comme pour décliner tout élan de fausse culpabilité ou de sollicitude. La mission passait avant tout. Vivre longtemps chez les Amazones était un luxe. Kayla sentit qu’il était temps de partager à leur tour les informations recueillies pour faire avancer leurs recherches communes. Il était temps de bousculer les suppositions pour obtenir enfin des certitudes.
– « Nos recherches nous ont conduites également à quelques pistes. Gwen et Elena ont trouvé des textes anciens mentionnant douze lueurs blanches, voire douze lueurs blanches et trois lueurs argentées. »
– « Argentées ? », s’étonna Sven, qui n’en croyait pas ce qu’il venait d’entendre. Elena et Alexis échangèrent un regard rapide avant qu’Alexis ne donne son consentement à cette dernière.
– « Seul un texte a précisé cette couleur mais nous y attachons une grande importance car la lueur de notre Kenza est effectivement argentée. Nous ne l’avions précisé dans l’immédiat car nous pensions qu’elle finirait par se rapprocher de celle d’Elise. La nuance était très faible au début, mais cette couleur chromatique s’impose chaque jour un peu plus. Ces lueurs blanches sont déjà très peu mentionnées. Hormis ce texte ancien, nous n’avions rien vu ou lu de plus sur les lueurs argentées. Dans tous les cas, ces textes font état de capacités surdéveloppées, de supériorité sur leurs semblables. Nous avions cru dès leur arrivée qu’elles étaient une mutation de notre race, des super-nous, si vous préférez. Mais depuis la révélation d’Aaron et des autres, cette supposition n’est plus d’actualité. »
– « Intéressant », s’enflamma Luis. « Pourrions-nous avoir une copie de ces textes afin de les étudier de notre côté avec les archives et textes que nous possédons ? Il nous reste peu d’ouvrages mais nous serions ravis de travailler avec vous sur ce sujet. »
– « Je vais demander à Gwen dès ce soir de vous les envoyer. Nous savons que nous pouvons vous faire confiance », répondit poliment Elena dans un sourire.
Cette bonne volonté allait peut-être leur faire oublier le mensonge par omission concernant la lueur de Kenza.
– « Autre point : Elise a été capable de forcer sa nature… », commençait prudemment Kayla.
Des regards médusés se tendaient vers Alexis qui ne savait que répondre, surtout à Jeff. – « Non, attends. Nous n’en sommes pas sûres. »
– « Elena, je t’en prie », reprit Kayla, d’un ton un peu plus ferme. « Même si ça ne concerne peut-être pas sa lueur, cela vaut le coup de le mentionner. Il faut leur dire pour y réfléchir ensemble. Le fait que ça ne soit pas mentionné dans nos textes n’est pas une coïncidence. Pour l’instant, avec les révélations sur Aaron et les autres, nous sommes revenues au point de départ : qui sont-ils, qui doit protéger qui de quoi et quand ? Si avec ça, tu ne vois pas la nécessité d’en apprendre plus… »
Le ton montait. Alexis les rappela au calme d’un regard et entreprit de relater le moindre détail de cette mutation forcée et incomplète aux trois alliés, qui jusqu’ici ne comprenaient rien. A la fin de ce récit, aucun n’était capable d’attribuer pour sûr ce phénomène à la lueur ou l’âme de guerrière. Leurs pensées furent interrompues par un SMS reçu sur le téléphone de Luis. Aaron avait eu vent de leurs visites et s’inquiétait de ce fait pour la santé d’Elise.
– « Je vous propose de vous reposer deux ou trois heures avant le repas de ce soir », invita Jeff. « Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, j’aimerais que Kayla s’entretienne avec Aaron pour le rassurer. Vous constaterez ainsi par vous-mêmes son état. »
– « Bien sûr, avec plaisir. Que m’est-il conseillé de garder pour moi ? », dit Kayla en se retournant une dernière fois vers le petit groupe.
– « Rien. Parle-lui à cœur ouvert. Il ne retrouve de l’énergie que lorsqu’il reçoit tes messages, tes photos ou vidéos. »
Alexis ne pouvait s’empêcher de ressentir énormément de peine pour Aaron, à travers les derniers mots de Jeff. Il avait toujours été un protecteur hors pair et les avait aidées dans tant de missions.
– « Tu peux tout lui raconter sur la folie qu’elle a faite … une bascule forcée », reprit-il en secouant sa tête de dépit, avant de s’esclaffer. « Bien fait pour Aaron ! Lui qui a toujours aimé défier mon autorité, il vient de tomber sur un être plus têtu et téméraire que lui. »
Cette remarque eut au moins le don de dérider l’assistance, qui ne reconnaissait que trop bien le guerrier sous ces traits.
– « Votre départ n’est prévu que dans quelques jours. Nous aurons tout le loisir de nous retrouver pour réfléchir encore ensemble sur cette énigme de lueur. Reposez- vous bien, mes amies. A ce soir. »
Se languir à en décrépir (L’Amazone, Chapitre 13)
Kayla sonna à la maisonnette que partageait Aaron et son colocataire, Sam. Elena et Alexis l’accompagnaient pour le saluer et s’assurer de sa santé. Elles ne pouvaient s’empêcher de constater de leurs yeux ce qu’il lui arrivait. Après tout le soutien apporté dans leurs missions communes, il faisait partie de la famille sans faire partie pour autant du clan. Ce qu’elles virent les fit frémir. Aaron, qui ouvrant la porte et reconnaissant Kayla s’était jeté dans ses bras, n’était plus que l’ombre de lui-même. Ses traits étaient tirés. Il avait perdu une masse musculaire importante mais pire que cela, il avait perdu sa joie de vivre. Ses yeux étaient éteints. Même si une petite étincelle avait fait surface en découvrant ses visiteuses, il semblait clair que l’espièglerie d’autrefois avait déserté ses yeux depuis un moment.
– « Oh, Dieu merci, vous êtes là. Que se passe-t-il ? Elle est vivante ? Elle va bien ? »
Même s’il tentait de se calmer, la peur se lisait dans ses yeux. Ce phénomène de cristallisation était incompréhensible et frustrant à la fois. Toutes ces pensées et cette énergie au service d’une autre personne…
Kayla se demandait alors s’il n’en était pas de même pour les voltigeuses envers l’Alpha. Elle avait vu ce regard chez Kenza et Elise les premières fois. Mais cette fixation s’était un peu calmée par la suite. Ou alors les filles arrivaient davantage à se maitriser. A la vue d’Alexis, Aaron se reprit. Même s’il avait partagé de nombreuses missions avec elle et pour elle, il ne pouvait que ressentir l’aura qui se dégageait de cette Alpha.
– « Bonjour Aaron », salua Alexis en le prenant dans ses bras (son sacrifice valait bien que l’on torde le protocole pour une accolade). « Elle va très bien, rassure-toi. Nous sommes venues à la suite de ta mutation pour réfléchir avec Jeff et les autres sur ce phénomène. Trop de questions se posent et nous avons besoin de mener ces recherches ensemble si l’on veut trouver rapidement des réponses. »
Aaron qui se sentit soulagé dès la première phrase, les fit entrer pour discuter.
– « Sam et moi n’attendions pas de visite. Nous n’avons pas pris le temps de ranger. Désolé », s’excusa-t-il nerveusement en déblayant deux ou trois fringues éparpillées dans le salon. « Maison de mecs », reprit-il comme excuse. « Je suis sûr que chez vous, cela doit être plus clean. »
– « Chez Kayla, pas sûr », plaisanta Elena.
Kayla leva les yeux au ciel. Aaron prit le parti d’en sourire. Alexis constata les dégâts de cette séparation imposée sur sa personne. Elle se refusait de le voir souffrir davantage et réfléchissait déjà à des options sur le court et moyen termes pour remédier à cette situation. Comment pouvait-on vivre avec ce poids sur le coeur ? Aaron proposa des rafraîchissements et collations mais essuya un refus poli.
– « Ça tombe bien, car je n’étais pas sûre que Sam se soit chargé cette semaine du réapprovisionnement. »
– « Nous étions juste passées quelques minutes pour prendre de tes nouvelles avant de nous reposer pour le dîner », lança Alexis.
– « Oh moi, ça va toujours. A part que je suis cloîtré chez moi ou à la salle de sport pour les entraînements. Ça devient pénible de tourner en rond. »
– « C’est juste une mesure de sécurité après ta mutation. Et puis je trouve que tu as fondu comme neige au soleil. Tu es un peu terne. Comment vas-tu vraiment ? Sans mensonge ni fanfaronnade, Aaron », enchaîna Alexis, soucieuse.
– « Ça va », avança-t-il dans un sourire triste. « Il n’y a pas mort d’hommes pour l’instant. Je patiente. Je sais que sa présence est essentielle pour vous… et puis, elle ne me connaît pas. Ça ne risque pas de l’atteindre », ajouta-t-il courageusement. Ou était-ce du fatalisme ?
– « Je te promets que nous allons trouver une solution », s’engagea Alexis en lui prenant les mains. « Elena passera un moment avec toi demain pour que tu lui racontes ce qu’il s’est passé te concernant : depuis ta cristallisation jusqu’à aujourd’hui, en passant par ta mutation. Nous espérons trouver des réponses pour Elise et Kenza. » Il acquiesça sans un mot.
– « Nous te laissons avec Kayla. Je vais repartir voir Jeff pour discuter d’autres sujets politiques et Elena doit contacter le clan pour partager des documents et archives. Je suis sûre que vous avez plein de choses à vous raconter. A ce soir, Aaron », finit Alexis dans un clin d’œil.
On voyait à sa tête qu’il n’attendait que d’être seul avec Kayla pour qu’elle lui parle d’Elise. Il attendait ce moment depuis qu’il avait vu la guerrière sous son porche. A peine sorties de la maisonnée, l’alpha et son euménide échangèrent un regard qui montrait leur accord total sur la situation.
– « Il est dans un état… », osa Elena sur un ton à peine audible pour Alexis. L’expression de son visage en disait long.
– « Oui, je ne pensais pas que ça l’affecterait physiquement aussi vite. Mais depuis l’entretien avec Sven et Luis, je suis en train de me dire que nous faisons peut-être fausse route depuis le début… »
– « Comment ça ? », s’étonna Elena.
– « Je sais qu’à la suite de nos échanges avec les autres, tu dois te dire que nous n’étions peut-être pas sensées intercepter Kenza et Elise car une autre entité se charge de les cacher à la vue de tous. Mais je me demande si cette cristallisation n’est pas un signe envoyé pour nous demander de la cacher et lui redonner sa liberté. Qu’Elise choisisse une autre voie que celle qu’on lui impose en ce moment, et par on, je ne veux pas dire nous. »
Elena tentait de comprendre le sens de l’hypothèse d’Alexis. Cette dernière était restée prudente et n’avait osé éveiller en vain de faux espoirs quant à la destinée d’Elise. Envisager qu’Elise n’était peut-être pas la remplaçante d’Elena pouvait être encore plus douloureux pour cette dernière si cette assomption se révélait fausse par la suite.
– « Je ne pense pas. Sinon, pourquoi n’aurait-on prévu qu’une porte de sortie pour Elise et Aaron et rien pour Kenza ? Pourquoi lui avoir donné une âme de guerrière ? Et surtout, pourquoi avoir permis à Elise de forcer partiellement sa bascule si elle n’était pas amenée à devenir l’une des nôtres ?
Alexis n’était pas convaincue mais ne dit rien.
– « On arrivera à comprendre le pourquoi. Et ensuite, on agira au mieux pour le bien de tous », voulut la rassurer Elena.
Contemplation (L’Amazone, Chapitre 13)
La porte venait de se fermer. Aaron enchaîna de suite.
– « Alors, tu as des nouvelles photos ? », dit-il la voix plein d’espoir.
– « Oh, bonjour Kayla ! Quel plaisir de te voir. Tu as l’air radieuse », le railla-t-elle dans une piteuse imitation. « Tout d’abord, je tiens à te remercier pour les rapports quasi-hebdo et toutes les photos et vidéos que tu m’envoies… »
– « Oh, c’est bon. Excuse-moi », râla-t-il. « Tu sais très bien que je te serai éternellement reconnaissant de tout ce que tu fais. »
– « J’espère, car je passe pour une folle à toujours lui tirer le portrait. »
– «Elle ne se doute de rien ? »
– « Je fais attention à ne pas prendre uniquement la Grenouille en photo et je lui donne quasiment tous les fichiers en double. Elle pense que c’est pour les archives d’Alex. Même si c’est aussi en partie le cas. »
– «Vous ne lui avez rien dit ? »
– « Non. »
Malgré lui, les traits de son visage s’affaissèrent. Une petite partie de lui espérait qu’elle connaissait son existence alors qu’il se morfondait chaque jour devant les nouveaux clichés.
– « C’est mieux comme ça. Vous avez raison. Comme je te le disais dans les emails, c’est horrible de savoir et d’être frustré de l’absence de l’autre. »
– « J’imagine. »
Kayla ne savait que dire. Elle ne connaissait rien à l’amour mais se voulait compatissante pour son ami.
– « Lorsque mes amis du clan venaient à parler de ce phénomène extrêmement rare chez nous, j’ai toujours cru que c’étaient des foutaises. Chez les « protecteurs », tu meurs ou tu meurs. Je pensais que leurs émotions étaient exagérées. En fait, survivre dans ces conditions est mille fois pire. Ça te dévore de l’intérieur. Heureusement que ça n’arrivait qu’à ceux qui était les cristaux destinés de vos guerrières et qu’ils pouvaient rapidement partir avec leurs promises. »
Kayla ne voulait pas interrompre ce moment de confidence. Ces derniers jours avaient dû être plus durs qu’à l’accoutumée. Il avait besoin de vider son sac.
– « L’ancien Aaron se serait foutu en rage de voir une telle loque. Je me lève en pensant à elle, je mange en pensant à elle et quand je me couche, c’est encore à elle que je pense. Le manque de missions n’arrange rien, je ne peux pas me changer les idées. Parfois, j’en ai mal au ventre comme si on m’avait flanqué une série de coups de pied. Et puis je me rends bien compte que je m’affaiblis et perds certaines de mes facultés… J’ai vraiment l’impression de dépendre d’une image. La pire des journées s’efface en un clin d’œil quand je vois que tu m’as envoyé un email, parce que je sais que tu vas me parler d’elle, que tu m’as envoyé des photos ou mieux, des vidéos. Ma chambre en est pleine. On dirait un sanctuaire de psychopathe. Sam n’y rentre plus, tellement il flippe. Et je ne te parle pas de mon téléphone portable dont la mémoire est saturée… », finit-il dans un sourire désabusé.
Kayla voulut donner un peu de peps à cette conversation morose.
– « Bon, dans ce cas, tu vas être content de me voir. Je t’ai apporté plein de nouvelles photos et même une vidéo d’elle avec sa famille. »
A l’évocation de ces média, Aaron se figea et fixa Kayla.
– « Son père et son frère sont venus lui rendre visite. Nous les avons filmés soi-disant pour les souvenirs, mais je t’ai apporté une copie. Je pense que ces extraits te plairont car elle rit, est détendue et surtout elle est en civile, hors contexte des entraînements. C’est la vraie Elise. »
– « Et je rencontrerai sa famille », murmura-t-il béatement, les yeux brillants d’émotions.
– « Je te laisse la clé usb pour que tu puisses les visionner encore et encore plus tard. Maintenant parle-moi un peu plus de tes entrainements et comment on peut t’aider au quotidien, dans la limite de nos possibilités. »
La théorie du rapprochement (L’Amazone, Chapitre 13)
– « Donc pour résumer, tu as senti une déchirure et c’est par la suite que tes frères ont vu ta lueur se modifier ? », s’apprêtait à noter Elena.
Elles étaient arrivées la veille dans ce camp. Il était grand temps pour Sven, Luis et elle de commencer leurs études et la prise de brief. L’état d’Aaron était loin d’être glorieux, mais plus ils en sauraient, plus ils avanceraient pour les aider, lui et les autres.
– « Non. La déchirure c’est plus tard. Sam, mon colloc, avait déjà perçu un changement de ma lueur à mon retour, après avoir vu mon cristal. A partir de ce moment, mes dons se sont affaiblis car… car j’en étais privé. »
Aaron se retenait pour éviter de froisser les guerrières.
– « Mais en me touchant lors des combats et entraînements, il la percevait toujours. Il y a un peu plus de trois semaines, ma lueur a commencé à devenir instable. C’est à cette période, je crois que Jeff vous avez contactées, mais vous aviez annulé votre séjour par la suite. Bref, un soir, j’ai commencé à ressentir de la fièvre. Il devait être deux heures du matin. J’ai commencé à m’agiter, puis j’ai perdu connaissance. Sam avait du mal à me maintenir sur mon lit. Lors de ces convulsions, j’ai senti à un moment une sorte de déchirure interne. Tellement forte que mon esprit s’est reconnecté, sous le choc, pour quelques minutes. J’ai de nouveau sombré jusque trois heures de l’après-midi, à peu près. Aucune séquelle, aucune blessure, pas de migraine ou d’esprit embrouillé. Juste ma lueur qui avait définitivement changé. »
– « Tu nous le confirmes, Sam ? », vérifia Luis.
Le comparse, qui se tenait au fond de la pièce depuis le début de l’entretien, acquiesçait gravement.
– « Attends… tu dis que cet épisode date d’il y a trois semaines ? », intervint brusquement Kayla.
– « Oui », confirma de nouveau Sam.
Alexis et Jeff était surpris d’entendre le son de la voix de Kayla, qui jusqu’ici servait davantage de témoin. Devant les regards interloqués, elle ne comprit pas elle-même qu’aucun n’ait fait le rapprochement, pourtant évident, avec Elise.
– « Ça t’est arrivé un mardi, n’est-ce pas ? Ou plutôt dans la nuit du mardi au mercredi. »
Même s’il s’agissait d’une affirmation, Aaron hocha de la tête pour confirmer. Elena qui comprit enfin où elle voulait en venir, souffla avec crainte le prénom de son cristal. Tous restaient cois, soit par ignorance, soit par peur de ce phénomène. Comme si le fait de citer son nom trois fois allait la faire apparaître comme Beetle Juice. Kayla développa la trame de ses dernières pensées.
– « Ta lueur n’a pas muté avant car cela ne venait pas de toi ou d’un évènement extérieur proche. Elise a forcé sa nature et réveillé une lueur différente de la sienne, cette fameuse nuit de mardi. Je m’avance peut-être mais je pense que tu as ressenti les douleurs de ton cristal et que ton âme a suivi le mouvement de la sienne en permutant sur cette nouvelle lueur. »
Sven intervint.
– « Cela me parait également trop bien synchronisé pour être une simple coïncidence. Mais comment expliques-tu l’instabilité de sa lueur les jours précédents ? »
– « Oui, et puis comment pourrait-elle initier ce mouvement alors que la cristallisation est incomplète ? Elle ne sait pas qu’Aaron existe », continuait Jeff. « Et pourquoi n’a- t-elle pas initié cette même transformation chez la deuxième voltigeuse ? »
Elena expliqua l’échec de Kenza la journée précédente. Le récit des dommages sur sa personne par ses dons trop sollicités fit frémir Aaron et ses frères. Alexis serra les mâchoires sous l’effet de la colère que réveillaient ces souvenirs. Kayla essayait toujours de remettre les pièces du puzzle dans l’ordre, mais il leur en manquait de nombreuses.
– « Très bien. Imaginons dans ce cas que ce mardi, un phénomène extérieur ou une force extérieure a poussé la grenouille et Aaron à muter. Dans ce cas, pourquoi pas Kenza ? Kenza est restée avec sa faible lueur argentée. Et si Elise avait émis sa lueur blanche plus tôt car elle était en contact constant avec Kenza ? Depuis sa mutation, Elise dégage désormais une brume épaisse et tellement froide. Elle nous
cryogénise », exagéra-t-elle volontairement, un sourire au coin des lèvres. « Son âme de guerrière lui a montré des choses, d’après ce qu’elle nous a dit. Et toujours d’après son récit, on ne peut que la croire. Mais sa révélation est incomplète. »
– « D’après ce que nous avons pu observer, nous restons sur le même canal de communication avec elle, d’où la perception de sa lueur, ou brume, comme vous préférez. Mais malgré sa force et sa bestialité révélées, elle ne fait toujours pas un avec son âme de guerrière. Elles cohabitent d’une façon que nous n’avons jamais encore observée auparavant. D’où le potentiel qui reste en suspens », renchérit Elena.
– « Attends un peu, je viens de tilter », arrêta Luis comme pour lui-même. Se tournant vers Kayla, il reprit : « tu dis qu’elle brûle froid ? »
– « Oui, froid. Et sa lueur blanche s’est déclinée sous la forme d’une brume épaisse », confirma cette dernière. Des regards s’échangèrent entre les guerriers. Sven toucha le bras d’Aaron et invita les autres à faire de même. La lueur d’Aaron restait perceptible mais à basse fréquence. Si basse qu’on ne pût encore la qualifier de lueur. Seule sa couleur se démarquait encore. Mais une chose était sûre pour tous : quelque que soit la forme de cette lueur, elle ne brûlait plus. Elle ne projetait pas encore de froid comme celle d’Elise, mais si le sentiment de Kayla s’avérait être le bon, cela ne devrait plus tardait. Comme une onde de choc, les effets secondaires de la mutation d’Elise se propageait avec un certain décalage sur Aaron. Peut-être était-ce dû à la distance entre les deux âmes.
– « Vous oubliez une chose dans tout ceci », reprit Kayla. « Si c’est le résultat d’une connexion entre deux cristaux, comment se fait-il qu’Aaron ait encore ses dons ? »
– « Ils déclinent depuis qu’il a vu votre protégée », corrigea Sven.
– « Faux. Ils déclinent depuis qu’il ne la voit plus, car il a été capable de les utiliser lors des combats qui ont suivi le sauvetage de la fausse Elise », dit Kayla.
– « Mais… mais peut-être que c’est ce qu’il doit se passer quand la cristallisation est incomplète », tenta Luis.
– « Je continue de croire que quelque chose les a touchés tous les deux, que ce soit à l’initiative d’Elise ou non, et que nous ne devrions pas nous baser sur nos antécédents en matière de cristallisation. Aaron a muté alors que la cristallisation n’était pas complète et qu’elle devait lui ôter ses dons. D’un autre côté, on a une Elise qui arrive à déclencher partiellement une révélation avec son âme de guerrière alors que son prédécesseur est encore en vie. Du moins, c’est ce que l’on croit. Et pour rappel, c’est également du jamais vu dans notre histoire. Il faut oublier ce que l’on sait pour avancer. »
Alexis sortit de sa torpeur.
– « Et s’il fallait les protéger ? Les aider à survivre? Je continue de dire que nous nous sommes trompés. Si l’entité qui s’est emparé des deux autres avait raison ? Imaginez qu’elle ne les a pas supprimés. Qu’elle les a regroupés pour les cacher et les protéger. Ils ont peut-être un rôle à jouer. Peut-être qu’ils sont plus forts ensemble… »
– « Tu n’y penses pas ? », coupa avec effroi Elena. « Désolée, Aaron, mais si Elise voit son cristal, elle risque de perdre ses dons. On ne peut pas se le permettre avec le combat qui approche. Je l’ai vu. J’ai vu la mort de Gwen… »
– « Tu n’as pas vu quand. Et puis, elle n’est peut-être pas sa remplaçante. »
– « On ne peut pas courir le risque, Alex. Ni pour toi, ni pour nos sœurs. »
Ce rappel à l’ordre de l’euménide mit un terme à ce débat. Du moins, Elena et les protecteurs le crurent. Mais le regard triste d’Aaron et son visage décharné convainquirent l’alpha.
– « Aaron, si tu veux t’approcher un jour un peu plus près de ta belle, tu vas te concentrer et utiliser tes dons maintenant sur la chaise qui est derrière moi ! »
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L’Amazone – Roman Fantasy – faits et fiction
L’origine des euménides
Tout remonte au conflit à l’origine de notre histoire: le sacrifice d’Iphigénie par son père Agamemnon et le meurtre de celui-ci par Egisthe. Lorsqu’Oreste, fils d’Agamemnon et frère d’Iphigénie dut venger le meurtre de son père et tuer par la même occasion sa mère qui était complice du meurtre de son époux (vous me suivez toujours là?), il fut poursuivi par les Erynies. Des démons femelles qui se chargeaient de poursuivre sans relâche les meurtriers dont les crimes avaient offensé les dieux ou contrarié leurs desseins. Un procès avait eu lieu pour le disculper: bah oui, tuer sa mère, c’est mal, mais visiblement, ne pas rendre justice à son père en tuant son meurtrier, c’est aussi grave. Les Erynies n’étaient pas ravies de l’issu de ce procès. Oreste, qui pour témoigner sa reconnaissance avait dédié un autel à Athéna, se voyait toujours persécuter. Athéna tenta de calmer les Erynies par la flatterie en vantant leur sagesse et leur intelligence. Elle les invita à se retirer dans une grotte du coin et leur promit de lancer un nouveau courant dans le culte qui lui était consacré: chaque foyer devant rendre grâce et faire des offrandes devant la grotte de ces dernières et en leur noms car elles représentaient des divinités souterraines. Trois d’entre elles acceptèrent son offre (Tisiphoné, Alecto et Mégère): elles deviendraient les marraines officielles des récoltes, des vents favorables pour les navires et des mariages féconds si elles acceptaient de foutre la paix à Oreste. Ce dernier passa la seconde sur le levier de l’hypocrisie et les renomma les « bienveillantes » (euménides).
Dans notre histoire, les gardes rapprochées des alphas héritèrent de ce nom ou titre pour leur côté harpies, mais également pour leurs dons presque « divins » pour mettre l’ennemi à mal, aussi bien via leur force, leur intellect ou leur fureur ancrée dans leur âme. Les euménides deviennent donc ici une caste spécifique des Amazones et Valkyries. Est-ce qu’une euménide est toujours une femme guerrière, une amazone ou valkyrie un peu plus fluette? A-t-elle toujours des dons? Comment se reproduisent les Amazones Euménides? Autant de questions dont vous trouverez peut-être les réponses dans les chapitres suivants.
Selon d’autres légendes, ces trois Erynies seraient en fait les trois Parques qui déterminent le destin des mortels et immortels. Elles avaient des têtes de chien, des ailes de chauve souris et des cheveux de serpents (tiens, encore des serpents). En acceptant ce deal de culte pour divinité souterraines, on scella en réalité le deal lancé aux prêtesses des Parques (anciennes Triple-déesse) pour devenir les prêtresses d’Athéna, fille de Zeus, et donc accepter la nouvelle forme de descendance par le père comme supérieure à la descendance par la mère. Ah le patriarcat, quand tu nous tiens!
Les Erynies ou Furies
Au nombre de trois, elles se nomment Tisiphoné, Mégère et Alecto. Ils vivent dans l’Erèbe et leur rôle principal est d’écouter les plaintes des mortels sur des manquements aux règles de bienséance ou des crimes (matricide, parricide, jeunes qui ne respectent plus les vieux, des invités qui ne respectent pas les hôtes). Elles poursuivent alors sans répit les auteurs de ces crimes et manquements. Plus vieilles que les dieux de l’Olympe, elles gardent un certain statut auprès de ces derniers. Leur chevelure est faite de serpents, elles gardent un aspect de vieille femme avec une tête de chauve-souris et leurs yeux sont injectés de sang. Elles torturent sans relâche leurs victimes qui meurent dans d’affreuses souffrances. Tout comme Voldemort, on évite de prononcer leur nom lors des conversations et pour contourner cet interdit, certains les appellent les euménides (ou Bienveillantes) pour calmer leurs colères.
Euménides et Parques
Selon d’autres légendes, ces trois Erynies seraient en fait les trois Parques qui déterminent le destin des mortels et immortels. Elles avaient des têtes de chien, des ailes de chauve souris et des cheveux de serpents (tiens, encore des serpents). En acceptant ce deal de culte pour divinité souterraines, on scella en réalité le deal lancé aux prêtesses des Parques (anciennes Triple-déesse) pour devenir les prêtresses d’Athéna, fille de Zeus, et donc accepter la nouvelle forme de descendance par le père comme supérieure à la descendance par la mère. Ah le patriarcat, quand tu nous tiens!